Édito : Ce que Macron a peut-être oublié !

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Boureima Guindo, éditorialiste et Directeur de publication de l'hebdomadaire Le Devoir

« Si la France n’était pas intervenue, si nos militaires n’étaient pas tombés au champ d’honneur en Afrique, si les opérations militaires (Serval puis Barkhane) n’avaient pas été décidées, nous ne parlerions aujourd’hui ni du Mali, ni du Burkina Faso, ni du Niger », a déclaré avec fierté Emmanuel Macron, lundi 28 août, devant les ambassadeurs français réunis à Paris pour leur conférence annuelle. Il ajoute que « ces États n’existeraient plus aujourd’hui dans leurs limites territoriales ». Cette déclaration peut blesser les populations des pays concernés, puisque le président français est allé bien trop loin en parlant de disparition de ces pays.  Mais sa déclaration contient une part de vérité. L’intervention de l’armée française a été, à un moment donné, salutaire voire nécessaire dans nos pays. Au Mali, elle a pu stopper l’avancée des terroristes vers le centre à travers ses interventions aériennes, notamment à Konna. Cela est une évidence, et les Maliens ont reconnu ces efforts. Mais combien de temps l’armée française a-t-elle réellement combattu les ennemis de la paix au Mali avec sincérité ? Pourquoi après les deux premiers mois de son intervention au Mali, la France n’a-t-elle pas pu obtenir des résultats encourageants contre les forces du mal, alors que son effectif s’augmentait chaque année, de même que ses moyens ? Macron connaît certainement les raisons de son échec cuisant pendant près dix ans de présence au Mali.

Cependant, avant d’aborder l’intervention au Sahel, Macron aurait dû parler de la manière dont l’insécurité s’est installée dans la région. Il a peut-être oublié que le Sahel n’aurait pas connu l’insécurité galopante si l’Otan, dont son pays est membre, n’était pas intervenue en Libye. Cela est une évidence. Le président français ne devrait donc pas oublier que son pays a contribué à l’instabilité au Sahel, même s’il se vante d’avoir aidé dans la lutte contre le terrorisme. Macron doit toujours se rappeler que son pays, à travers son intervention au Sahel, a joué le rôle de « pompier pyromane ».

Aussi, il a sûrement oublié que ce sont les Africains, y compris les ressortissants des pays qu’il a cités, qui sont d’abord morts pour la France avant que les Français ne meurent pour l’Afrique ? A-t-il oublié le sacrifice des Africains pendant la seconde guerre mondiale ? Il est temps que le président français cesse de ridiculiser son pays par des déclarations légères.

Aujourd’hui, il devrait plutôt reconnaître les torts de son pays dans l’expansion du terrorisme au Sahel, plutôt que de se vanter d’être intervenu au secours des pays victimes. Ces pays sont victimes du terrorisme, mais ils sont également victimes des puissances qui ont contribué à leur instabilité.

Boureima Guindo

Source : Le Devoir

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